«Au pays de sang et de miel » Angelina Jolie

Il y a eu 50 000 viols durant l’explosion de la Yougoslavie. Crime contre l’humanité. Volonté d’humilier, de mépriser, de rejeter la population bosniaque.

Le pire qui puisse arriver à un pays, c’est de sombrer dans une guerre civile. On le savait. On le voit.

Sur fond d’horreur quotidienne, de violence banalisée, Angelina Jolie nous offre un film plutôt bien fait, généreux, avec des acteurs à la hauteur de leur rôle, une mise en scène sobre, mais la sauce a du mal à prendre.

D’abord, l’intrigue est difficilement vraisemblable : Roméo et Juliette en Bosnie-Herzégovine.

Soient deux jeunes gens amoureux l’un de l’autre, un serbe, une bosniaque. C’était courant avant la guerre. Explosion ! Et c’est parti ! Quelques mois plus tard, elle est raflée pour servir de repos du guerrier dans un « bordel de campagne », l’armée française a fait cela en Algérie, réécouter la chanson de Brel « Au suivant », et le capitaine n’est autre que…Danjel, l’homme qu’elle aime et qui, bien sûr se la réserve.

Heureux hasard, hein !

En plus, le Danjel, c’est le fils du méchant de chez méchant, une caricature de Milozevic, un haineux quasiment nazi quoique pas encore borgne.

Bon ! Il y a de la tension dans l’air. Les serbes en prennent plein la gueule. Les bosniaques seraient des gentils. Et l’on se demande bien pourquoi un pays, qui s’était levé contre le nazisme, s’était libéré, s’était éloigné de l’URSS, s’était érigé en fédération, où l’on y vivait un peu mieux que dans les autres pays de l’est, a soudainement plongé dans l’horreur.

Les scènes d’amour sont esthétiques, les scènes de viol sont édulcorées, la violence n’a rien de pornographique dans la mesure où l’on en voit que les effets.

Aucune archive historique ne vient renforcer la reconstitution. Tourné en Tchékie ou en Hongrie, les minarets de Sarajevo ont disparu du paysage. Bien plus l’on nous ferait croire que tout était sérénité entre les différentes populations avant le coup de folie. Quant à la « complicité » des démocraties dans ces nettoyages ethniques, elle aussi est suggérée.

Il est vrai que cela devient une coutume. L’on déplore les massacres des innocents, et lorsqu’on intervient, l’on massacre encore plus efficacement.

Ce qu’a aussi oublié de nous dire Angelina dans la dénonciation de cette abomination, c’est que la région, avec l’Ukraine, expédie vers l’Europe une part non négligeable des travailleuses du sexe de nos villes, et exporte des armes que l’on retrouve entre les mains de la pègre.

Décidément, même si pour un premier film, Angelina Jolie nous offre un produit de qualité, elle nous fait aussi la preuve que les bons sentiments ne sont pas suffisants pour créer un grand film.